J'attire à mon tour l'attention sur
une dérive dans laquelle persiste le Comité Interministériel
d'Aménagement du Territoire (CIAT). Le CIAT entraîne dans cette
dérive la Chambre de commerce et d'industrie d’Haïti (CCIH), la
Banque centrale (BRH), la Banque inter-américaine de développement
(BID), les pouvoirs locaux des collectivités territoriales. Il
entraîne aussi –plus important peut-être– le Centre de
facilitation des investissements (CFI) qui a la lourde responsabilité
non seulement de faciliter les investissements mais de les guider.
Un développement équilibré,
équitable et durable ne peut faire l'économie d'une vision
territoriale claire qui tienne compte de la réalité dans toute sa
complexité. Malheureusement, le CIAT part d'une perspective
imaginaire de l'existant pour présenter une vision tout à fait
chimérique de l'aménagement du territoire. Le CIAT fourvoie dans
son errance les institutions du secteur privé. C'est une énorme
responsabilité pour une institution étatique de mal diriger des
investisseurs dans un pays « ready for
business ». Je réfère le lecteur à mon article publié
dans l'Atlas Caraïbe: « La boucle "Centre-Artibonite".Un milliard de dollars pour tuer une région ».
Le CIAT est-il un gouvernement à lui
seul ? Il devrait être un chef d'orchestre qui s'assure d'une
harmonie de toutes les instances de l'État en matière d'aménagement
du territoire. Comment se fait-il alors que les réflexions de ce
comité et celles du Ministère de la Planification soient
développées de façon tout à fait autonomiques ?
Le MPCE a en effet mis en débat public
son Plan Stratégique pour le Développement d'Haïti (PSDH),
document dont la facture révèle un certain professionnalisme.
Pendant ce temps, le CIAT fait la promotion d'un plan qui n'a rien à
voir avec le PSDH et qui n'est sérieux que par les conséquences
néfastes qui risquent d'en découler. Tout se passe comme si l'Unité
d'Aménagement du Territoire du MPCE et le CIAT recevaient leurs
fonds de sources différentes et devaient par conséquent satisfaire
la fantaisie de bailleurs distincts !
On ne peut continuer à admettre que
les fonds destinés au progrès d'Haïti continuent à être non
seulement gaspillés mais en plus à servir contre Haïti et ceux qui
veulent se risquer à y investir.
De l'époque coloniale au XXIe siècle, l'espace économique haïtien a subi trois mutations. Quatre stades donc dans son évolution. Cette évolution a entraîné des changements dans le fonctionnement dualiste de la société :
Les places à vivre et les marchés de nègres sont une réponse à la plantation coloniale et au morcellement.
Les lakous du XIXe siècle sont une réponse aux oligarchies régionales.
Les "bourg-jardins"sont une réponse à la centralisation.
Les "Nouvelles Provinces" appuyés par la diaspora sont une réponse à la métropolisation.
Classez les villes de la plus grande à la plus petite.
Organisez le tableur avec :
Dans la colonne A, le nom de la ville
Dans la colonne B, son rang (écrivez le rang pour chaque ville)
Dans la colonne C, sa population
Dans la colonne D, inscrivez le logarithme du rang
Dans la colonne E, le logarithme de la population
Faites tracer un diagramme en XY (dispersion) avec log(rang) et log(population)
Observez à l’œil sur le diagramme les irrégularités dans la distribution et essayez de regrouper les villes haïtiennes par niveau.
Ensuite, vous allez faire l'exercice de regrouper ces villes par niveaux à partir d'un seuil de rupture. Pour vous aider, vous vous basez sur la loi rang-taille avec b=1.
Soit Pr la population de la ville de rang r. Si la loi rang-taille était parfaitement respectée, on aurait :
donc,
et
Dans la colonne F, calculez le Pr théorique à partir de la formule précédente (la population théorique de Port-au-Prince est la même que la population observée). Pour les autres villes, par exemple, pour Gonaïves (rang 3), la population théorique est la population du Cap-Haïtien (rang 2) multipliée par 2 et divisée par 3.
Pour déterminer les points de rupture, comparez Pr observé (colonne C) et Pr théorique calculé à partir de Pr-1 (colonne F).
La différence entre ces 2 valeurs rapportée à la population observée, Pr, permet de déterminer des seuils de rupture dans la distribution des villes.
Dans la colonne G, calculez:
Formatez la colonne G en %.
Dans la colonne H, vous allez mettre le niveau des villes (mettez 1 pour Port-au-Prince).
Si la population théorique d'une ville dépasse d'au mois 15% la population observée, classez cette ville à un niveau inférieur.
A quel rang classez-vous le Cap-Haïtien, Gonaïves, Saint-Marc?
Combien de niveaux avez-vous déterminé?
Remplissez ce tableau :
Niveau
Nombre de villes d'après la colonne H
Nombre de villes selon de principe de marché de Christaller
Nombre de villes selon le principe de transport de Christaller
Nombre de villes selon le principe administratif de Christaller
1
Comparez les résultats du nombre de villes par niveau observé aux nombres de villes par niveau selon les 3 principes de Christaller.
Pour étudier l''évolution de l'espace haïtien, nous nous basons essentiellement sur les travaux de George Anglade.
Si vous ne l'avez toujours pas fait, téléchargez les documents suivants qui sont de consultation obligatoire (l'examen final peut aborder n'importe quel élément contenu dans ces documents) :
Enfin, le manifeste politique du « mouvement Lavalas » à ses début doit être consulté. Même si les idées qui y sont présentes ont été évacuées (en partie pour n'avoir pas été comprises), ce manifeste montre comment la perspective géographique peut conduire à la conception d'un projet politique de transformation de la société.
August Lösch a apporté un nouvel éclairage à la théorie des places centrales. Il a en plus abordé la problématique de la localisation des activités économiques en général. Y compris les questions de l'identité nationale et de l'impact du progrès technologique sur le raccourcissement des distances économiques.
Dans une œuvre originale, Lösch s’est donc penché sur l’ensemble de la problématique de localisation des activités économique. Les réflexions sur les réseaux urbains (places centrales) ne sont donc qu’une partie de sa réflexion.
Les régions économiques font suite au traitements des problèmes de localisation industrielle et agricole. Ces problèmes de localisation, Lösch les traite en tenant compte des acquis de Weber et de Thünen, chacun en ce qui le concerne.
Sa critique de Weber concerne, entre autres, la question de l’équilibre général alors que Weber traite le problème en termes d’équilibre partiel. Lösch va donc plus loin en tenant compte par exemple de la dynamique entre les variations de prix et de demande, et les choix de localisation industrielle. Il prend également en compte la compétition entre entreprises avec, en considérant de façon critique la solution de Hotelling.
De la même manière, les anneaux de Thünen sont reconsidérés pour prendre en compte les différents facteurs tels les variations de l’offre et de la demande.
Dans les deux cas, Lösh aboutit à la conclusion que la solution géométrique est trop simpliste pour répondre à la complexité de l’équation.
Lösch traite également des choix de localisation des consommateurs.
C’est après avoir considéré la logique de localisation des agents économiques, et sur cette base que Lösch se lance dans l’étude de la localisation des agglomérations urbaines, des réseaux de places centrales et des régions économiques.
Il considère et critique l’approche de Christaller pour développer sa propre vision.
Certains se demandent ce que la « loi rang-taille » apporte à notre compréhension de la localisation des activités économiques puisqu’elle ne considère pas la distance. Certes, la loi rang-taille en soi ne fait pas intervenir la question de distance. Elle constitue néanmoins un outil précieux pour la compréhension des systèmes urbains.
D’autre part, l’étude des irrégularités dans la distribution rang-taille d’un système urbain permet un regroupement des villes par niveaux. Et la répartition géographique des villes de différents niveaux peut être étudiée. Là, la distance intervient.
Indice de primatie
La loi rang-taille
s’exprime ainsi :
ou log( Pr) = -b log(r) + log(c)
avec r = rang de la
ville
Pr = Population de la ville de rang r
b et c
des constantes.
La distribution des populations des villes d'un système urbain peut être utilisée pour calculer b et c par la méthode des moindres carrés. Alors, c
représente la population théorique de la première ville.
Un grand écart
entre la population de la première ville ( P1) et celle
de la seconde (P2) pose-t-il problème ? À priori
non.
Cependant, le
rapport P1/P2 est un indice de primatie. Un
autre indice de primatie est le rapport P1/c. Des indices
de primatie élevés sont propres aux systèmes urbains centralisés.
C’est la centralisation qu’il faut donc questionner.
Dans l'équation ci-haut, le coefficient b représente la pente de la droite de régression logarithmique. La taille des villes diminue d'autant plus vite que b est élevé. C'est pourquoi b est qualifié de coefficient de hiérarchisation.
Est une illustration de l'utilisation du concept d'attraction urbaine. Ce concept a été l'un des éléments clés pour démontrer l'absurdité du projet de "Boucle".
Vous pourrez relire ce texte
- après l'étude de la théorie des places centrales de Christaller et Lösch,
- encore après avoir vu l'évolution de l'espace haïtien d'après Georges Anglade
- et encore après avoir étudié le réseau urbain versus le réseau des marchés publics haïtiens.
Tous ces outils théoriques ont été mis à profit ainsi que (accessoirement il est vrai) la loi rang-taille.
Voyez donc comment on peut associer, articuler tous ces outils pour produire une analyse sérieuse d'un problème géographique.
Un acteur économique se trouvant à un endroit donné subi l'influence des villes ou autres lieux centraux. Il est attiré par ces pôles.
Le modèle d'attraction urbaine de William Reilly permet d'évaluer la force d'attraction des centres urbains dans l'espace géographique. Il permet aussi d'aborder la problématique des systèmes urbains.
Comme il est dit dans la présentation, l'exposant dans la loi de Reilly dépend du système urbain. L'exposant rend compte de la difficulté de déplacements. Plus les déplacements sont difficiles, plus l'exposant est élevé.
Si dans le temps les déplacement sont rendus plus fluides, l'exposant diminue. cela augmente la capacité d'attraction relative des grandes villes (et leur aire d'influence). Cela signifie que le développement des réseaux de communication (réseau routier, maritime, télécommunications) favorise le développement des plus grandes villes.
Le choix de localisation d'une industrie est influencé par de nombreux facteurs. Nous allons en aborder quelques uns.
Les coûts de transport
La vidéo suivante présente le principe de base du modèle de localisation industrielle de Alfred Weber en ce qui concerne les coûts de transport.
En résumé, l'industrie cherche à minimiser les frais de transport:
La source d'une matière première coûteuse à transporter attire l'industrie.
La place de marché d'un produit fini coûteux à transporter attire l'industrie.
Les économies et déséconomies
À retenir trois autres facteurs importants dans le développement des industries et leur localisation:
Les économies internes, principalement liées à la taille, l'échelle de l'entreprise compte tenu de la technologie mais aussi à l'organisation de l'entreprise et aux talents et savoir faire mis à contribution. Il y a une taille optimale (rendements croissants et décroissants); au-delà de cette taille, il y a dés-économie d'échelle.
Les économies externes de localisation qui viennent de la concentration d'entreprises de même type ou complémentaires. Elles viennent en grande partie du partage de ressources nécessaires à ce type d'industrie (pôles de compétitivité ou clusters).
Les économies externes d'urbanisation qui viennent de la masse urbaine où les industries et les ressources sont regroupées. Mais ce regroupement crée des frictions qui sont des dés-économies.
En plus de la question du coût de transport de la
matière première et du produit fini, ces trois facteurs sont
essentiels, particulièrement pour les décisions de localisation en
milieu rural.
Les économies internes sont liées à la dimension de
l’entreprise et
Les économies externes sont liées à son environnement.
Économies / déséconomies internes
Pour simplifier, la production d’un bien
implique des coûts fixes et des coûts variables. L’administration,
les frais de location d’un local ne varient pas, que l’on
produise une seule unité ou 10 unités. Par contre, le coût de la
matière première est liée à la quantité produite.
Supposons qu’une petite unité de production de
chaises métalliques capable de produire 25 chaises par jour pour une
journée normale de 8 heures. Il y a possibilité de produire
également la nuit pour doubler la période de production.
Les coûts de production comportent :
des frais de 800
gourdes par jour pour le loyer et l’administration
500 gourdes pour
l’achat de matières premières pour chaque chaise
200 gourdes de main d’œuvre pour chaque
chaise. Cependant, le travail de nuit coûte le double, soit 400
gourdes par chaise.
Les coûts fixes sont donc de 800 gourdes. Les
coûts variables sont de 700 gourdes par unité pour les 25 premières
chaises et de 900 gourdes pour les 25 chaises additionnelles.
Économies d’échelle
Le
coût de production de la première chaise est de 800 + 700 = 1 500
gourdes.
Le coût de production de 2 chaises est de 800 +
1 400 = 2 200 gourdes, soit 1 100 gourdes par chaise.
Le coût de production de 25 chaises est de 800 +
(700 *25) = 18 300 gourdes, soit 732 gourdes par chaise en
moyenne. Le coût moyen de production diminue avec la quantité.
C’est ce qu’on appelle économie d’échelle.
Déséconomies d'échelle
Que se passe t-il si le propriétaire décide de
produire durant la nuit ? Hé bien, pour chaque chaise
supplémentaire il devra dépenser 900 gourdes. Le coût moyen de
production de 26 chaises est de 18 300 + 900 = 19 200
gourdes, soit 19 200 / 26 = 738 gourdes. Donc, à partir de la
26e chaise, le coût moyen augmente ; il y a
déséconomie d’échelle.
Taille optimale
En
résumé, il y a économie d’échelle jusqu’à 25 chaises et
déséconomie pour augmenter la production de 26 à 50 chaises. De la
même manière, admettant qu’une chaise se vende 800 gourdes, les
profits de la journée augmentent avec la production, jusqu’à 25
chaises, puis diminuent. La dimension optimale de l’entreprise est
donc de 25 chaises par jour. Mais il faut bien comprendre que cette
dimension dépend de la technologie mise à contribution. Par
exemple, une unité artisanale n’a pas la même dimension optimale
qu’une unité industrielle.
Les décisions de production qui conduisent aux
économies d'échelle ont rapport à l'entreprise elle-même. C'est
pourquoi on parle d'économies (et de déséconomies) internes.
Économies externes
Une entreprise peut aussi bénéficier d'économies
qui ne dépendent pas d'elle et pour lesquelles elle ne paie pas en
principe.
Économies de localisation
Lorsque la production globale d'une industrie
augmente, cela permet de réduire ses coûts de production. Par
exemple, une plus forte demande globale pour un intrant peut réduire
son coût. L'avantage ainsi obtenu ne dépend pas de l'entreprise
individuelle qui en bénéficie. Cet avantage est souvent lié à une
concentration géographique d'activités similaires ou
complémentaires. Par exemple, la concentration de plusieurs petites
unités de transformation de produits agricoles peut réduire le coût
d'utilisation d'expertise de contrôle de qualité. Un autre exemple
est la présence d'un verger au voisinage d'un rucher. Le producteur
de miel bénéficie des arbres fruitiers qui permettent de nourrir
ses abeilles.
Dans une conception plus large, les services
écosystémiques rendus par un exploitant agroforestier de montagne
en amont permet une économie externe de localisation pour un
producteur de céréales (ou industriel) en aval. En effet, l'agroforesterie dans les bassins versants des plaines permet de minimiser les risques d'inondation (et de destruction des infrastructures); elle permet aussi une plus grande disponibilité de l'eau en saison sèche. C'est pourquoi un paiement pour services écosystémiques des exploitants en aval des plaines peut contribuer à maintenir un équilibre écologique.
Ce sont les économies de localisation qui
justifient les politiques de support aux pôles de compétitivité ou
aux clusters. L'État encourage la concentration géographique
d'industries similaires ainsi que d'industries complémentaires
(recherche-développement, formation de cadres et d'ouvriers
spécialisés, production d'intrants...). Cela permet à ces pôles
d'augmenter leurs performances techniques et de diminuer leurs coûts.
Ces industries deviennent alors plus compétitives.
Cette concentration peut aussi aboutir à des
déséconomies. L'engorgement de villes portuaires est un exemple de
déséconomie de localisation.
Économies d'urbanisation
Enfin, certaines économies externes viennent de
la concentration géographique d'activités économiques quelconques.
Les facilités de communication, la présence de services de toute
sorte et de personnel qualifié, la concentration d'un grand nombre
de consommateurs, tout cela bénéficie à l'entreprise installée
dans une zone urbaine consistante. C'est à cause de ces économies d'agglomération que les industries ont
tendance à s'établir en ville.
Mais les concentrations urbaines ne sont pas sans
inconvénients. Les embouteillages, la pollution atmosphérique, le
bruit sont des facteurs qui peuvent induire une baisse de
productivité. Voilà des déséconomies d'urbanisation.
Le développement technologique
Dans les industries de haute technologie, le facteur coût de transport perd de l’importance au profit d’autres facteurs tels la disponibilité de ressources humaines pour les activités de recherche-développement, l’accès aux réseaux de télécommunication, les coûts de production (salaires).
D’une façon générale, le progrès dans le domaine des transports qui réduit leurs coûts, ainsi que développement des technologies de l’information et de la communication permettent une diffusion plus grande des activités industrielles. Ainsi, l’espace rural, particulièrement au voisinage des villes, peut constituer un choix de localisation industriel à cause des déséconomies d’agglomération et des salaires plus bas mais aussi de l’attrait du paysage. Le développement des industries agro-alimentaires peut dans ce sens initier la genèse de pôles ruraux qui peuvent attirer par la suite d’autres activités industrielles.
Les documents suivants concernent le PSDH (Plan Stratégique de Développement d'Haïti) pour le Département du Sud. Examinez la place réservée au secteur secondaire et à la localisation des activités industrielles, Ce sera discuté en classe.
a) Il semble évident que l'agriculture et le tourisme soient retenus comme secteurs prioritaires, moteurs. Quelle stratégie industrielle est prévue?
b) Les théories de localisation industrielle ont-elles été considérées dans la conception de la "stratégie"? Les question de coûts de transport, d'économies d'échelle, de localisation et d'agglomération ainsi que les dés-économies ont-elles été prises en compte?
c) En prélude à l'étude du développement polarisé, disons que si une activité est retenue comme un pôle économique, c'est qu'elle a un effet d'entraînement. Quel effet d'entraînement du tourisme par exemple est pris en comptedans la "stratégie régionale"?